Énergie et développement durable

La société que nous voulons s’inscrit pleinement dans le développement durable. Cela implique, à moyen (2050) et à long terme (2100), de laisser aux futures générations une planète où l’on pourra vivre de façon pérenne, et en particulier deux choses :
– utiliser des énergies renouvelables,
– réduire l’usage des ressources épuisables et accroître leur recyclage.

L’énergie
Les scénarios montrent tous une plus large utilisation de l’électricité, car c’est une forme d’énergie plus efficace (meilleur rendement énergétique) même si elle se stocke difficilement. La production d’électricité est donc un point clef.

Les études prospectives sur les coûts montrent la poursuite de la baisse des coûts moyens des énergies renouvelables comme le synthétise le Tableau 1.

Tableau 1: Coûts moyens estimés par les principales études prospectives.

Si l’énergie photovoltaïque confirme la baisse des coûts, la nuit il n’y a pas de soleil. L’éolien peut en partie compenser cela, mais c’est aussi une énergie intermittente. Les formes de production d’énergie qui peuvent garantir une production sont le gaz notamment avec des turbines à gaz en cycle combiné et le nucléaire. Le gaz est une énergie carbonée et donc seul le nucléaire peut à moyen terme garantir une production d’énergie décarbonée.

Propositions à court terme

1- La baisse des coûts de production des énergies renouvelables montre que l’on peut arrêter les subventions relatives à leurs installations, sauf pour les particuliers en autoconsommation. L’aide à l’installation de panneaux photovoltaïques pour les particuliers s’appliquera principalement aux zones peu denses et sera compensée par des réductions d’importation.
Nous suggérons pour ces derniers des prêts à taux favorable et garantis par l’État.

2- La filière nucléaire française doit être soutenue avec la décision de créer 6 nouvelles tranches (EPR2 ou équivalent) à moyen terme afin de
– assurer un niveau plancher de production garantie et décarbonée , , ,
– de permettre de poursuivre l’augmentation de la part d’énergie renouvelable et intermittente,
– de maintenir le savoir-faire français et les emplois associés jusqu’en 2050.
Nous suggérons la mise en service de 2 nouvelles tranches en 2035, l’échéancier pour les 4 suivantes restant à préciser selon le rythme effectif de fermeture des anciennes tranches (14 arrêts prévus d’ici à 2035 dans le cadre de la PPE et le démarrage des installations intermittentes.

Cela représenterait environ 10 GW de capacité pour un coût de l’ordre de 50 milliards € .

La sécurité du nucléaire est un sujet primordial. Pour répondre aux accidents majeurs, les technologies EPR puis EPR2 ont été créées pour éviter tout accident. L’autre sujet récurrent est la gestion des déchets nucléaires. Compte tenu des plus de 400 réacteurs nucléaires dans le monde, la filière de gestion des déchets est déjà largement développée. Leur stockage en profondeur est à ce jour la solution la plus étudiée et retenue par les pays producteurs d’électricité nucléaire, même ceux qui ont décidé d’arrêter cette filière.

1- Le développement de l’énergie photovoltaïque va se poursuivre partout dans le monde. Il est donc opportun de développer une filière de production de panneaux photovoltaïque en France voire en Europe. Si cette question est à l’ordre du jour , la pérennité d’une filière européenne demande une garantie d’achat que pourrait par exemple fournir un « Buy American Act » Européen voire Français que nous proposons. Les investissements publics pour l’énergie renouvelable en France et en Europe doivent utiliser au moins 50 % de produits fabriqués en Europe.

Propositions à moyen et long terme

Pour la France, EDF restera, compte tenu des différents risques, l’opérateur pour l’énergie nucléaire, mais la tarification devra évoluer pour garantir la rentabilité des opérations.

Le prix de l’électricité pour les particuliers devra progressivement se rapprocher des prix pratiqués dans les pays voisins. Ce prix va donc augmenter. Il faut aussi libérer le prix pour autoriser des variations dans la journée. Ainsi, les particuliers seront incités à consommer surtout quand l’électricité renouvelable sera disponible. Cela permettra aussi le développement de produits domestiques intelligents utilisant l’énergie quand elle est disponible et peu chère : machine à laver, chauffage électrique à inertie, recharge de véhicules électriques…
La réglementation devra évoluer pour encourager ces usages.

Le PV et un peu l’éolien, vont continuer de se développer et vont contribuer à réduire les importations de produits pétroliers. L’intérêt majeur et stratégique du PV est de le développer proche du besoin, dans les métropoles, près des centres industriels et sans stockage, en évitant la connexion réseau. Cette stratégie permettra aussi de réduire les coûts des réseaux de transport de l’électricité.
Les applications visées pour le PV stratégique sont :
– les industries fortes consommatrices d’énergie dont les produits sont stockables (ciment, acier …),
– le chauffage PV à accumulation dans l’habitat,
– la mobilité électrique avec recharge dans la journée.

La réglementation devra favoriser ces nouveaux usages et la taxe carbone devra continuer à augmenter pour les favoriser. Au total, ces applications pourraient viser avec un taux annuel de renouvellement de 1 % à moyen terme environ 30 % de l’énergie finale en 2050 et à long terme (2100) 80 % de l’énergie finale.

Financement de la recherche et du développement

Dans le domaine de l’énergie, mais aussi de façon plus générale, la recherche et le développement (R&D) permettent de développer et de construire les futurs outils industriels et donc les emplois de demain.
Ainsi le Général de Gaulle a multiplié par 3 les dépenses de R&D dans les années 1960 , , portant la France au 3e rang mondial de l’innovation. Clairement, cela a largement contribué à développer l’outil industriel français de l’époque, avec les succès que l’on connaît.
Aujourd’hui, la France avec 2,19 % de son PIB consacré à la R&D est classée 12/15 par l’OCDE . La Corée du Sud investit plus de 2 fois plus dans cet effort, et il est facile d’identifier les succès industriels de la Corée du Sud.
La recherche publique française regroupe les organismes de recherche et les universités. Le financement de la recherche publique est d’environ 20 G€ soit 0,9 % du PIB . Le financement européen de la recherche (H2020) correspond à moins de 0,1 % du PIB, ramené à la population française.
Le défaut principal de la recherche française est l’absence de tremplins efficaces pour la valorisation des travaux de recherche. Le modèle allemand des instituts Fraunhofer est à suivre, notamment en termes de gouvernance incluant des industriels voire des régions.

Nous proposons de remonter l’objectif de dépenses de R&D à 4 % du PIB avec 1.5 % pour le financement de la recherche publique, notamment pour le domaine de l’énergie décarbonée, et d’accroître le pilotage de la recherche par des appels à projets y compris de démonstration.

Conversion de l’énergie renouvelable en gaz

Pour participer à résoudre le problème du stockage de l’électricité produite de façon intermittente, la recherche et le développement sur le « power to gas » devront en particulier être renforcés, jusqu’à la mise en œuvre de démonstrateurs.

Le « power to gas » que l’on peut traduire par conversion de l’énergie en gaz, consiste à transformer l’énergie électrique en énergie chimique (gaz). Le gaz (hydrogène ou méthane) ainsi produit peut être utilisé pour générer à nouveau de l’énergie soit électrique soit par combustion. Cette technique sera utile pour stocker le surplus d’électricité généré par de l’éolien ou du photovoltaïque à terme (2040-2050), car aujourd’hui et jusqu’à 2035, la régulation de la production d’électricité en fonction de la consommation restera gérable par les leviers déjà existants (hydraulique, nucléaire…).

Des pilotes sont en cours en France. Le rendement énergétique de cette technologie est faible : seulement 35 % à 44 % de l’énergie sera restituée pour l’hydrogène et de 25 à 35 % pour le méthane. Que ce soit pour le photovoltaïque ou pour l’éolien, il vaut mieux utiliser l’électricité directement si c’est possible. Ces rendements seront amenés à augmenter avec les améliorations des technologies de production de ces deux gaz. Enfin, le côté « vert » de produire du méthane par cette technique est qu’elle nécessite du CO2. C’est un débouché pour une filière de captage et de stockage de CO2 qui sera ainsi valorisable.

Les ressources
Comme dit en préambule, nous devons « réduire l’usage des ressources épuisables et accroître leur recyclage ».
Concernant le recyclage des déchets ménagers , la filière de valorisation, déjà existante, reste à perfectionner, notamment par un tri plus spécialisé. Pour les déchets industriels, le principal problème aujourd’hui est que le recyclage est rarement rentable. Pour favoriser ce recyclage, nous rappelons notre proposition de
– « Buy European Act »,
que nous pouvons compléter par
– une taxe verte à l’importation en Europe , en outre pas seulement limitée au secteur de l’énergie, mais pour tous les biens.

L’eau
Les enjeux autour de l’eau en France ne sont pas majeurs ; ils concernent essentiellement sa qualité par endroits et sa quantité disponible en période de sécheresse selon le Centre d’information sur l’eau (CIEAU) .
En ce qui concerne la qualité de l’eau, la prohibition de certains engrais/pesticides (déjà initiée) et l’accroissement de la part de l’agriculture raisonnée (en cours) devraient réduire les problèmes de pollution des nappes phréatiques.

En ce qui concerne la quantité d’eau disponible en saison sèche, plusieurs mesures (pas de loi !) peuvent être utiles :
Inciter à l’installation de systèmes de récupération d’eau de pluie pour les constructions individuelles neuves (TVA réduite à 10% déjà actée, encourager les communes à subventionner les initiatives individuelles),
ralentir certains cours d’eau à l’aide de « banquettes » afin de laisser le temps à l’eau de percoler vers les nappes phréatiques (instruction aux Agences de l’eau),
construire des retenues d’eau qui permettent de stocker l’eau en hiver (voire de réduire le risque d’inondation) et de la reverser en été (instruction aux Agences de l’eau).

Les métaux stratégiques

Les métaux stratégiques dont les terres rares sont assez nombreux (quelques dizaines), il ne s’agit pas ici de faire une étude spécifique pour chacun d’eux, ce serait trop long et technique. En revanche, il apparaît clairement un déficit d’organisation en France et à l’échelle européenne sur ces questions stratégiques , d’où la proposition suivante :

Création d’une agence française, voire européenne, des ressources stratégiques, en redéployant certaines ressources humaines de différents instituts (BRGM…), avec des moyens augmentés
Cette agence indépendante des groupes privés aurait un rôle d’expertise, d’observatoire et d’orientation en matière de politique industrielle, et de financement de projets de recherche sur les traitements propres et le recyclage ou la substitution des métaux stratégiques.

– Pour mutualiser les risques (pollution, approvisionnement…) création d’un consortium européen de production et de recyclage de matériaux stratégiques.

Lien avec l’aménagement du territoire
L’énergie, les ressources et le développement durable sont naturellement en lien avec l’aménagement du territoire et certaines de nos propositions concernent les zones peu densément peuplées. Toutefois l’essentiel de nos propositions, dans ce document, concerne principalement l’énergie et les ressources. La mobilité est un autre sujet intimement lié à l’énergie et aux ressources, mais elle est bien davantage associée à l’aménagement du territoire. Un document à venir traitera plus spécifiquement de ces sujets.

Contribution du comité du développement durable,
le mercredi 8 juillet 2020

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